Alexis de Tocqueville.

[LORD]

Boujou.

Cent cinquante ans après sa mort, le politicien et politologue manchois reste un sujet d'étude pertinent.C'est le cas pour un universitaire granvillais qui s'est fait remarquer aux USA.

Rencontre.

Jean-Louis Benoît a opté pour une vie paisible dans la campagne granvillaise. C'est dans sa retraite famiale que l'universitaire poursuit avec passion ses recherches. Son sujet d'études favori ? Alexis de Tocqueville. Un personnage qui l'occupe presque à plein-temps... Et si ses travaux restent méconnus dans l'Hexagone, il est reconnu outre-Atlantique comme l'un des spécialistes du célèbre politicien, politologue et sociologue manchois (1805-1859). « Je ne fais pas partie du sérail parisien, insiste Jean-Louis Benoît. Du coup, je reste quasiment ignoré des médias nationaux ! Cela ne m'empêche pas d'être l'un des seuls Français conviés lors de colloques internationaux sur Tocqueville. Mes articles et mes ouvrages bénéficient d'une mise en ligne sur le site de l'université de Laval, au Québec, site de Jean-Marie Tremblay. On y trouve le plus grand nombre de textes de philosophie politique, de sociologues et penseurs du XVIII^e au XX^e siècle. Il est sans équivalent ! »

Cursus. Jean-Louis Benoît est agrégé de l'université, diplômé de philosophie politique et docteur ès lettres. Il a été chargé de cours à l'université de Caen.Ses contributions à la connaissance de Tocqueville et au rayonnement de sa pensée, sont multiples. Il a notamment dirigé la publication du tome XIV des oeuvres complètes aux éditions Gallimard. On trouve en format poche (2005) un recueil des textes économiques d'Alexis de Tocqueville, « pratiquement tous recensés » avec une anthologie critique qu'il a faite avec Eric Kelassy. Il est également co-organisateur de colloques. Le premier s'est tenu dans la Manche en 1990 sur le thème de l'actualité de Tocqueville, en partenariat avec le conseil général. Le deuxième a eu lieu en mai 2005 à Cerisy-la-Salle à l'occasion du bicentenaire de sa naissance, sur Tocqueville entre L'Europe et les États-Unis.

Spécialiste.En septembre 2008, Jean-Louis Benoît a été invité à un colloque international à Saint-Jacques-de-Compostelle (en Espagne). « Je fus le seul Français à intervenir. L'occasion pour moi de rappeler la pertinence de Tocqueville, qui est considéré par les Américains au même rang que les pères fondateurs de la démocratie nord-américaine. Dans son ouvrage de 1835, De la démocratie en Amérique, il analyse les institutions politiques du pays. Il démontre que le surgissement démocratique est inéluctable, d'abord en Europe occidentale. Mais les commentateurs oublient souvent la dernière partie de l'ouvrage dans laquelle, après avoir établi les mérites de la démocratie américaine, il dénonce le fait qu'elle soit établie sur un double crime contre l'humanité : le génocide du peuple indien d'une part, et l'esclavage des Noirs de l'autre. Il est, à ma connaissance, le premier à avoir employé cette expression dans les lettres qu'il adresse à ses amis américains. C'était en 1857. »

Obama : ère nouvelle. L'élection de Barak Obama marque pour Jean-Louis Benoît « un tournant capital » dans l'histoire pour les Américains, comme pour le monde. « Elle marque le début d'une ère nouvelle... Je me réfère encore au caractère visionnaire de Tocqueville dans son ouvrage de référence. Il est assuré que la solution au problème racial, lié à celui de l'esclavage, sera difficile à trouver. Il faudra plus d'un siècle après l'abolition de l'esclavage pour que les Noirs obtiennent leurs droits civiques, en 1964. Mais dès 1835, Alexis de Tocqueville affirmait que l'acceptation du métissage est la seule issue possible. »
Les articles de Jean-Louis Benoît sont consultables sur le site de l'université du Québec (UQAC).

Roberte JOURDON.
Ouest-France