Armand Frémont sur l'unification.
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Armand Frémont sur l'unification.
Boujou.
ci-joint l'excellent texte du géographe Armand FREMONT qui passe à la moulinette tous les arguments des anti- réunificateurs!
A lire sur le très bon site "Normandie2010.org" (les géographes normands se mobilisent aussi pour un vrai débat régional normand aux régionales de 2010)
C'est à lire d'urgence!
"Questions récurrentes défavorables à l’unification de la Normandie"
Posté le 13 septembre 2009 | Carte Blanche à A. Frémont
Source : site http://www.Normandie2010.org
ci-joint l'excellent texte du géographe Armand FREMONT qui passe à la moulinette tous les arguments des anti- réunificateurs!
A lire sur le très bon site "Normandie2010.org" (les géographes normands se mobilisent aussi pour un vrai débat régional normand aux régionales de 2010)
C'est à lire d'urgence!
"Questions récurrentes défavorables à l’unification de la Normandie"
Posté le 13 septembre 2009 | Carte Blanche à A. Frémont
Source : site http://www.Normandie2010.org
Armand FREMONT
Mes prises de position sur l’unification de la Normandie sont connues, je pense. Depuis une vingtaine d’années maintenant, j’estime indispensable l’unification de la Normandie pour développer un projet, une dynamique, une image permettant de rompre le conservatisme et la stagnation qui frappent et figent les deux petites régions de Haute et de Basse-Normandie depuis au moins deux générations, entre une Ile de France qui maintenant déborde sur les régions voisines sans prévision ni réflexion et une Bretagne exemplaire dans son dynamisme et son aptitude à retenir toutes les opportunité, voire à les susciter.
Les initiatives récentes du président de la République laissent espérer la mise en route de l’unification en une seule région. Mais rien ne me semble vraiment joué, tellement est prise l’habitude de l’inertie et des mauvais arguments, ou, plus simplement, du conservatisme. Je crois donc utiles aujourd’hui d’inventorier les principales thèses habituellement développées depuis une trentaine d’années pour s’opposer à l’unification de la Normandie en une seule grande région… Et d’indiquer en quelques mots mon point de vue pour y répondre.
-1- Il y a vraiment mieux à faire.
J’ai moi-même utilisé cet argument pendant assez longtemps (années 60/70). Il y a mieux à faire que perdre son temps à disserter sur l’intérêt de l’unification alors que des questions beaucoup plus urgentes et cruciales se posent : la crise économique dans son expression régionale, le chômage, la pauvreté, l’urbanisme, les crises agricoles, une nouvelle culture, une nouvelle société dans leur expression territoriale… etc. L’unification à ce niveau est au mieux un jeu intellectuel, portant sur une superstructure administrative peu aux prises avec les réalités, parfois hors des réalités, et au pire une perte de temps, un dérivatif…
Certes. Mais la proposition peut aussi s’inverser. La faiblesse de deux petites régions n’intervient-elle pas aussi comme un facteur de crises et de problèmes récurrents ? Faut-il négliger à ce point dans nos raisonnements les facteurs politiques et administratifs ? J’ai clairement pris conscience du découpage régional et de son importance lorsque j’ai occupé des fonctions de responsabilité dans d’autres régions, importantes celles-ci, Rhône-Alpes, Ile-de-France, et plus encore au sein de ministères ou d’organismes nationaux. Vues de là, que pèsent les deux petites Normandie dans les prises de décision ? Et, au demeurant, quel est le succès des deux petites régions face aux problèmes, si ce n’est plutôt faible ? On doit les situer au niveau de la Corse et du Limousin ou de la Franche-Comté, alors que les régions vedettes, outre l’Ile-de-France, se nomment Rhône-Alpes, PACA, Bretagne, Midi-Pyrénées…
-2- Il y a deux Normandie, traditionnellement et maintenant, aux orientations différentes.
Un classique de la géographie : la Haute-Normandie, faisant clairement partie du Bassin Parisien, maritime et industrielle, urbaine, penchant plutôt à gauche…la Basse-Normandie, appartenant à l’ouest de la France, terrienne, bocagère, plus isolée, nettement plus loin de Paris, nettement conservatrice.
Et maintenant aussi : les deux régions ont cinquante ans et ce n’est pas rien dans les habitudes et l’identification ; elles ont chacune leur capitale régionale, de bon poids tant économique que politique et culturel ; elles ont un style de développement ou des réactions face aux crises très différentes ; la Haute-Normandie est de plus en plus sous l’emprise parisienne et maritime, la Basse-Normandie beaucoup moins.
Oui, ce contraste existe bien, et il serait oiseux de le nier. Mais…
Est-il aussi rigide que cela ? Par exemple, Caen, sa riche plaine, le pays d’Auge des résidences secondaires et de la côte, l’estuaire autour d’Honfleur participent étroitement d’une même problématique territoriale que la Haute-Normandie. Et, inversement, le département de l’Eure, surtout vers l’ouest, est très proche d’une organisation bas-normande.
En outre, une grande région doit assembler des complémentarités plutôt que de recherche une illusoire homogénéité. Rhône-Alpes ou Provence-Alpes-Côte d’Azur sont elles homogènes ? Y a-t-il en France et même en Europe des régions homogènes ?
Le projet d’une Normandie unifiée a au contraire l’intérêt d’assembler des dualités, des jonctions, des relations : fondamentalement entre de réels atouts économiques (qui ne sont pas seulement en Haute-Normandie, cf Caen) et des espaces agréables à vivre (qui ne sont pas uniquement en Basse-Normandie, cf le pays de Caux ou la vallée de la Seine), entre une large façade maritime et de fortes attaches terriennes.
-3- Il n’y a pas d’identité normande
Normandie, Normands, ce ne sont que des mots qui prêtent à sourire. Rien de comparable ici à de fortes identités qui soudent une région comme en Alsace et en Bretagne. L’histoire ? La Normandie est française depuis huit siècles. Les coutumes ? Laminées par les lois de la République et par les modes de vie contemporains. Les parlers ? Au pluriel plutôt qu’au singulier. La religion ? Catholique affaiblie, protestante au passé, sceptique plutôt. A trop chercher une identité normande, on finit même par la rendre suspecte à force d’évoquer les Vikings, les drakkars, la goutte et le bonhomme normand par-dessus le marché. La Normandie est simplement une vieille province française, parfaitement intégrée, vouée comme ailleurs à toutes les mobilités, s’identifiant par son folklore, ses héros et ses bons mots, beaucoup plus que par ses réalités.
Assurément, tout ceci est bien vrai. Mais encore…
La richesse du patrimoine normand est incontestable. Peu de régions françaises ont donné autant et simultanément à l’architecture, au roman, à la peinture, à l’art de la navigation comme à l’agriculture, à la fois dans le passé médiéval et moderne ainsi qu’à présent.
L’identité est vécue aussi dans les réalités contemporaines, dans l’urbanisation, l’émigration vers Paris, et le maintien de liens avec les origines rurales et maritimes. Les Normands s’identifient mal parce que les familles se situent souvent sur une trajectoire de migration, mais la Normandie dans cette mobilité s’identifie plutôt très bien.
Enfin l’identification de la Normandie, son image, vues de l’extérieur, sont très fortes. Par les romanciers du XIX° siècle, par les peintres impressionnistes, par le débarquement de 1944, la Normandie est connue du monde entier. A cette échelle, la Haute et la Basse n’existent pas. Ceci constitue un atout de première importance à notre époque de communication, alors que les deux petites régions mal connues sont de lourds handicaps.
-4- L’extension parisienne vers la basse Seine enterre définitivement la Normandie
Le projet d’Antoine Grumbach a relancé un débat récurrent. Rouen et Le Havre, la Basse Seine en général, constituent le prolongement naturel de Paris vers la mer. Déjà, les Vikings et Rollon l’avaient compris ! Que dire des industriels et des navigateurs du XIX° et du XX° siècle ! Toute la Haute-Normandie peut s’investir sur un tel projet, un modèle de rue urbaine d’une grande métropole jusqu’à la mer, entrecoupée de forêts, de sites fluviaux, de grandes et riches plaines…La Basse-Normndie se situe dans son ensemble hors d’un tel schéma. Le grand projet, le voici, le dynamisme à venir se localise très fortement dans ce cadre privilégié. A la Basse-Normandie de jouer son destin autrement.
Oui, le projet Basse Seine – Paris est un grand projet, incontournable d’une manière ou d’une autre. Mais à trois conditions :
- Ne pas marginaliser un peu plus la Basse-Normandie (ses élus l’ont bien compris)
- Inclure la rive gauche de la Seine en même temps que la rive droite, notamment au niveau de l’estuaire et du tripôle urbain Rouen – Le Havre – Caen.
- Créer une grande région de Normandie, faisant poids en contrepoint de la région parisienne plutôt qu’un nouveau satellite parisien dans la Basse Seine où même Rouen et Le Havre perdraient définitivement l’initiative et leur âme. Je considère cet argument comme décisif.
-5- Quelle capitale régionale d’une Normandie unifiée ? Sacrifier Rouen ou Caen ?
Aucune des deux capitales actuelles ne s’impose, dans le passé comme au présent. Et en choisir une, c’est sacrifier l’autre, du point de vue de l’emploi (administratif) comme du rayonnement (économique, politique, culturel).
Faux. La Normandie n’est pas un cas unique mais classique de doublet ou de triplet urbain animant une même région. Une ferme volonté politique doit imposer par un choix clair un intérêt supérieur. En esquisse, trois choix possibles :
- équilibré : favoriser l’aménagement du territoire et une relative centralité >> Caen
- audacieux : privilégier l’ouverture maritime, une assez bonne centralité, surprendre >> Le Havre
- réaliste : tenir compte du poids démographique et économique >> Rouen
- compromis prospectif : répartir les fonctions capitales dans le tripôle >> Caen – Rouen
Le Havre
NB — Des compensations économiques devraient être apportées à la ville qui ne serait pas choisie.
– Je ne marque personnellement aucune préférence.
– L’argument Avranches et l’Avranchin si loin de Rouen !… ou Neufchâtel et le Tréport si loin de Caen !… doivent être écartés. Toute région a sur ses limites de tels cas inévitablement plus proches d’une autre région (Rennes et la Bretagne, Amiens et la Picardie) que de sa propre capitale régionale, y compris dans le découpage actuel.
-6- Plutôt qu’une soudaine décision, choisir les coopérations réalistes, bilatérales
La politique des petits pas s’impose. L’unification n’est pas prête. Mieux vaut d’abord coopérer, faire des choses ensemble, mieux se connaître et avancer ainsi dans le bon sens…
Argument en cours depuis une bonne trentaine d’années, recevable au début comme nécessité faute de mieux, inadmissible maintenant comme tactique de retardement…
Les résultats ainsi obtenus sont-ils probants ? Il est permis d’en douter. Le véritable résultat est que l’essentiel ne change pas.
Jamais l’échéance n’a été aussi proche. Vers un échec probable ou vers un grand projet d’une Normandie relancée ?
- Armand Frémont -
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